Et si je vous parlais. Non pas de quelqu’un qui a capté mon attention, pas seulement quelqu’un que j’apprécie, mais quelqu’un que j’admire, le maitre des anticonformistes, quelqu’un que j’aime profondément. Il s’agit du grand regretté George Brassens.

A l’occasion on parlera donc de cet art de raconter des histoires, mais surtout, comment à travers celle-ci nous pouvons véhiculer des valeurs et rassembler. Je parlerai de l’anticonformisme de Georges Brassens et bien entendu, en lien avec ma thématique on évoquera de storytelling. Comment le pratiquer et pourquoi il est important dans vos projets d’entreprise..

Mon père était un grand fan de Georges Brassens et j’ai grandi en l’entendant régulièrement fredonner ses chansons. Mais tout petit bien sûr, je ne pouvais pas l’apprécier à sa juste valeur, je n’ai évidemment pas saisi immédiatement la profondeur de ses textes. J’ai pris conscience de son talent plus tard, adolescent, moi qui à l’époque étais dans le rap, à fond dans dans culture hip-hop que je pensais être la plus créative et intelligente oui, oui.. la plus intelligente puisque j’y entendais des messages forts, de l’engagement, de l’impertinence et j’y voyais mon quotidien, ma réalité..

Un jour j’entends mon père dans la pièce d’à côté écouter la chanson « l’hécatombe » puis ça a été le choc.. Comment ce gentil monsieur avec sa petite moustache grise, sa pipe, celui qui chantait « les copains d’abords » pouvait ainsi faire l’apologie d’un gendarmicide.. alors qu’on me reprochait régulièrement d’écouter et pratiquer un genre musical trop violent, sans déconner. J’interpelle alors mon père à ce sujet et il m’a répondu en souriant « mais ça petit ce n’est rien » alors j’ai tout écouté : le gorille, misogynie à part, le pornographe, mauvaise réputation, 14 18, putain de toi, le mécréant, ou encre, trompettes de la renommé.. Chaque thème, chaque phrase, chaque mot.. j’ai adoré. Surtout que derrière se cachait toujours un message simple, mais puissant.. Saviez-vous par exemple que la chanson « les amoureux des bancs publics » malgré son apparente légèreté, était une attaque concernant une lois qui visait à supprimer ces bancs des grandes villes pour que les sans abris n’ai plus à s’y reposer.. Bref, l’oeuvre de Brassens n’a plus de secret pour moi. Puis je n’ai jamais plus entendu un esprit aussi juste et touchant. Brassens m’a fait rire, pleurer mais surtout il m’a fait réfléchir, il m’a changé et toujours inspiré.

L’autodidacte..

Plus qu’un artiste, un artisan du mot et du propos. Si Brassens est un poète reconnu il n’est pour autant qu’un autodidacte, aussi bien de la littérature que de la musique. Un troubadour qui chantait pour ses potes avant de se vendre. Et s’il y en a un qui n’a pas changé d’un poile après le succès c’est bien lui. Brassens admirait tellement d’auteurs qu’il en avait des complexes. Une modestie presque maladive, un grand timide terrorisé en scène, et pourtant.. Tous le monde s’accorde aujourd’hui à dire qu’il est un monument de la chanson française !

Alors cher entrepreneur ou créatif, il y a bien des leçons à tirer de cette homme et de son travail. D’abords il me semble que sa force se trouvait dans ces habitudes, sa façon de consacrer l’essentiel de son temps à son art. Ensuite, Brassens était un homme méthodique, perfectionniste qui pouvait abandonner un texte pendant des années si les mots ne tombaient pas justes. En somme, sa musique était le fruit d’une routine de passionné. Sa productivité s’intégrait naturellement dans son quotidien et sa créativité s’inspirait directement de celle-ci, de sa vie, de son temps et d’émotions basiques. Son but n’était pas d’entrer au panthéon, mais de toucher le public, point. Il se voulait populaire et multi-générationnel et ceci malgré le fait qu’il n’était pas sur les chemins qui mènent à Rome.

L’indépendant.. 

Puis, il fait le lien entre deux époques. À cheval entre la grande guerre et mai 68, il a toujours mis l’accent sur ses opinions, en portant que peu d’intérêt aux consensus. Il encourageait la révolte sans pour autant se greffer à la masse hurlante « mourir pour ses idées d’accords, mais de mort lente » un pacifiste extrémiste, libre comme le déserteur, parfois montré du doigt « sauf par les manchots ça va de soit » et admiré par les autres pour ses prises de positions. Il n’a jamais choisi de camps. Brassens pouvait saluer les revendications de la jeunesse par ailleurs, il distinguait les idiots dans leur rang « quand on est con on est con » puisqu’en effet on peut le constater, les soixante-huitards d’hier sont les vieux conservateurs d’aujourd’hui.

Alors au détour d’une rime, il ne manquait jamais l’occasion de nous rappeler que la révolution, c’est bien.. Mais encore faut il savoir quoi en faire. George Brassens n’avait qu’un privilège à protéger, son indépendance..

Storytelling..

En marketing on parle de storytelling pour raconter l’histoire d’une marque, présenter un récit pour convaincre et vendre. Mais ses règles sont les même depuis l’aube des temps et n’appartiennent évidemment pas aux publicitaires. Si Brassens me plait tant c’est que son œuvre est chargé d’idées et de valeurs. Et s’il a su me faire comprendre et accepter ses points de vu, s’il m’a convaincu, alors il m’a converti en fan. C’est exactement les objectifs d’un storytelling.

Et ici je ne parle pas d’éloquence, lui n’était pas réputé pour ses prestations scéniques, contrairement à Jaque Brel par exemple. Lui ce distingait dans l’intimité de l’écriture. Brassens prend soins de nous raconter toutes un tas d’histoires, il capte notre attention, éveille notre curiosité et nous piquer le moment venu pour passer son message. On reviendra plus tard sur sa botte secrète, en attendant on va voir les quelques principes pour créer une bonne histoire.. 

Je vous mets au défi de ne pas sourire : Misogynie à part

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Structure et schéma narratif..

La structure est traditionnellement et ici de façon synthétique c’est : planter le décor, les personnages, puis survient le problème, puis celui-ci est résolu, et enfin, on en tire une conclusion, une morale faisant un lien avec nos objectifs. Notre marque, produit ou service pour les commerçants. Mais c’est pareil pour une idée ou une opinion. Abandonnez les gens avec votre morale, laissez mijoter et enfin vous saurez convaincre. La finalité sera soit, inspirer, motiver, transmettre des connaissances, partager des valeurs, faire évoluer les opinions ou, donner du sens..

Pour le schéma narratif : Tu peux utiliser cette méthode, du Mais, Alors, par exemple.. Je me ballade dans la rue, mais je vois quelqu’un que je n’aime pas, alors je change de trottoir et me cache, mais il me reconnaît et vient à ma rencontre, alors je me met à courir, mais il court plus vite que moi, alors je grimpe dans un bus, etc.. Jusqu’au dénouement. 

Emotions et besoins primaires..

D’abords, toucher l’auditoire à travers nos émotions primaires comme : la joie, la colère, la peur, le dégoût, la tristesse ou encore la surprise. En suite, satisfaire au moins un de nos besoins primaires : le besoin physiologique, de sécurité, d’appartenance, d’estime et d’accomplissement. Ci-dessous la Pyramide de Maslow. Dans une bonne histoire, votre produit ou entreprise devra donc idéalement répondre à un de ces besoins..

Convaincre et vendre..

Le storytelling est partout, dans la publicité pour une diffusion de masse, mais aussi, dans votre vie de tout les jour. En convention face à un public d’investisseur ou d’actionnaires par exemple. Ou encore lors d’une argumentation commerciale classique en face à face. Au travail, en réunion, si tu es manager notamment. Concrètement, tu peux raconter une histoire quelconque. Exemple : Tu es un chef d’équipe et que tu souhaites mobiliser tes collaborateurs.. tu aimerais qu’ils s’investissent plus.

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L’histoire : Jonny the bagger

Dans un petite ville aux États-Unis, le patron d’un petit supermarché réuni ses salariés car c’est la crise, il devra licencier ou fermer boutique.. alors il réunit ses équipes et leur demande comme une faveur, de réfléchir chacun, à leur niveau sur une idée qui pourrait améliorer la situation.. Johnny est un jeune trisomique qui travail en caisse et qui aide les clients à ranger leur marchandises. En rentrant chez lui le jour même, voulant donc aider son patron, il prend alors ce calendrier qu’il a chez lui, ce genre de calendrier qui lui donne une situation positive pour chaque jour.. Il décide de recopier chacune de ces phrases sur des petits bouts de papier et dès le lendemain, il commence à les glisser dans chaque paquet des clients.. Quelques semaines plupart les affaires vont mieux et le patron remarque l’initiative de Johnny grâce aux retours positifs des clients..

La morale est donc qu’une bonne idée peut venir de n’importe qui et que celle-ci n’a pas besoin d’être extraordinaire.

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Le publicitaire s’appuiera souvent sur l’histoire, les valeurs et parfois sur la personnalité du fondateur de l’entreprise. Le but est de fédérer, véhiculer, confiance et stimuler l’acte d’achat. Il n’utilisera très probablement une ou plusieurs des émotions et besoins primaires. Il mettra en image et musique les faveurs physiologiques et de sécurité assez facilement selon le produit. Puis de façon implicite, les notions d’appartenance, d’estime ou d’accomplissement. À noter que sur les réseaux sociaux aujourd’hui, presque toutes les marques tentent de répondre au besoin d’appartenance, qui eux, les réseaux sociaux, déjà jouent de l’estime personnelle des utilisateurs avec le principe des likes, de partage évidemment..

Anti-conformiste..

La particularité des histoires et des idées de George Brassens, sa botte secrète, résident dans leur ligne anticonformiste. Les opinions de Brassens sont souvent en décalages avec les biens pensants de son époque. Les croquants et les croquantes comme il aime les appeler. Eux seront allègrement bousculés d’une chanson à l’autre. Le reste des auditeurs seront simplement surpris ou amusés de l’original point de vu de l’artiste.. Puis qu’entendre est une chose, retenir en est une autre. La structure, la morale, les émotions et les besoins c’est la base. Lui est capable de tordre nos convictions, jouer avec nos émotions, faisant parfois même l’avocat du diable, en allant à contre- sens, mais toujours avec bon sens.. Un jour Brassens se fait cambrioler, je ne sais pas si c’est vrai mais en tout cas il en fait un chanson et se contente de plaindre son voleur, d’en être arrivé à le voler lui, lui qui n’a rien. Au climax de celle-ci, il recompte que sa guitare lui a été volé et demande simplement à son nouveau propriétaire d’en faire bon usage et le pardonne.. Ou encore dans cette chanson, où il fait très solennellement et amoureusement sa « non demande en mariage » etc..

Conclusion..

Brassens est un rebelle, qu’on l’aime ou le déteste, il a au moins le mérite de provoquer quelque chose. Mais notez que votre storytelling n’est pas à inventer, mais à trouver. Cherchez dans votre histoire et vos expériences, ce qui font vos valeurs d’aujourd’hui. Il ne s’agit pas de se différencier à tout prix et n’importe comment. Servez-vous de votre nature profonde et votre singularité apparaîtra naturellement. Soyez original et innovant, l’anticonformisme n’est qu’une terminologie parmi d’autres..

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Bonus..

Le charisme de Tyler Durden